La Raison 91, Numéro 71 : Le Vagabond à la fin du XIXe siècle de Jean-François Wagniart, par Louis Couturier

dimanche 27 janvier 2019
par  lpEssonne
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Je me permets de vous recommander la lecture de l’ouvrage de Jean-François WAGNIART « Le vagabond à la fin du XIXe siècle (351 pages, Belin 1999).

Au temps de Marx et d’Engels et plus tard, on a appelé cette classe vagabonde « Le lumpen prolétariat » et on l’a considérée comme un danger pour la classe ouvrière sans produire des approches historiques objectives.

Et pour cause, le monde des « gueux », les « rejetés du monde », les « chercheurs de pain  » (er klaskour bara en breton) n’ont pas laissés de traces personnelles : ni mémoires, ni correspondances.

Ces obstacles ont été surmontés magistralement par notre ami Jean-François, il a su cerner la réalité de ce monde opaque, par des voies périphériques.
Des sources littéraires abondantes : Victor Hugo, Maupassant, Zola, Vallès, O. Mirbeau, Séverine, Pouget, Richepin, Bruant, Reclus, Bouhélier, dont il a tiré des citations qui rafraîchiront la mémoire de beaucoup
Les dossiers de la justice criminelle
Les recensements et enquêtes sur le vagabondage (aux résultats indicatifs souvent douteux).

Il en a tiré néanmoins une sociologie historique et géographique du vagabondage au XIXe siècle, une présentation de ses causes économiques et sociales et des explications sur les motivations de cette errance. Le vagabond-type livré à « l’enfer du paupérisme » était jeune, célibataire, travailleur non qualifié, journalier, manÅ“uvrier, terrassier ou sans profession, vagabond par choix personnel ou par contrainte.

Les pages sur les « remèdes » évoquent les débats d’aujourd’hui (charité, assistance ou répression) ainsi que l’évocation des glissements qui mènent à considérer le pauvre errant comme un malheureux puis comme un réfractaire et, in fine, comme un criminel potentiel avéré.

Réalité du XIXe siècle qui anticipe celle qui se répand aujourd’hui : les mots ont changé, la diabolisation change de forme mais le fond reste le même. Les « rejetés du monde » ne se comptent plus par centaines de milliers mais par centaines de millions : migrants, sans papiers, zonards, réfugiés…

Bref, un travail sérieux, bien documenté, éclairé par une trentaine de pages de notes.

De fait, une contribution incontournable qu’il n’est pas trop tard de découvrir et de faire découvrir.

Bonne découverte.
Louis Couturier


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