Diderot a eu 300 ans le 5 octobre 2013

florilège de citations et début de bibliographie pour le colloque Diderot et la liberté de penser
lundi 7 octobre 2013
par  lpOise
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liberté de pensée, esprit de Diderot

liberté d’expression, dire Diderot

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Le samedi 2 novembre sera un événement à l’Hôtel de ville de Clermont.

Il aura pour thème : « Comment penser librement selon Diderot ? »

Le président de la Libre Pensée, Marc Blondel ouvrira les débats par "Liberté de pensée, liberté de penser" à 13h30.

Puis, Pierre Chartier et Laurent Loty pratiqueront l’art du dialogue à la façon de Diderot, pour dire Diderot.

  • Pierre Chartier et Laurent Loty diront chacun comment ils perçoivent l’art de Diderot, l’art d’un Ã©crivain de la libération, qui libère ses prochains de toutes les autorités illégitimes, en leur donnant les moyens de s’éclairer eux-mêmes. Ils liront et commenteront ses pensées et ses récits, ils dialogueront entre eux et avec Christian Peythieu qui donnera son corps et sa voix à l’ami Denis qui a toujours su associer le corps et l’esprit, l’oral et l’écrit, la pensée et la vie.
  • “En 1749, Diderot est emprisonné. Il a 36 ans et vient de publier la Lettre sur les aveugles. Il sort de prison à la condition de ne plus jamais publier d’ouvrages contre la religion, et grâce au soutien des puissants éditeurs de la future Encyclopédie. La prison et l’Encyclopédie l’ont rendu célèbre... et déterminé à ne quasiment rien publier de son vivant. C’est à ce prix que l’esprit le plus libre de son temps a échappé à une nouvelle incarcération. Mais en retour, cette clandestinité l’a soustrait plus qu’un autre à l’autocensure, et a exacerbé son désir de s’adresser à des lecteurs. De là cette étrange impression que Diderot est notre contemporain, et notre ami. Notre contemporain parce qu’une grande partie des libertés auxquelles il aspirait sont encore à conquérir. Et notre ami parce que son rejet de l’autoritarisme et son goût du dialogue n’en font pas un maître à penser, mais le compagnon d’une libération à laquelle il nous associe.
  • Philosophe artisan, il pratique la libre association d’idées. Sa méthode est indisciplinaire : il enquête en utilisant tous les savoirs du temps, mais sans se soumettre à leurs effets sclérosants. Elle est sérendipienne : il s’étonne d’un fait que personne ne remarque, il l’interprète, et il examine sa propre interprétation. Elle est réflexive : Il ne cesse de dialoguer avec lui-même comme si c’était autrui, et de mettre en place des structures narratives avec mise en abyme (dialogue dans le dialogue, récit dans le récit).
  • Diderot est mal reconnu par l’institution philosophique. Cela tient aussi à la grandeur de Diderot qui est, indissociablement, philosophe et écrivain, puisque les idées naissent de la parole et de l’écriture. Philosophe artiste, il met la fiction au service de la vérité, parce que l’imagination accède à des savoirs que la raison ignore, et que les personnages éclairent ce que des spéculations abstraites risquent d’occulter.”

Pierre Chartier est professeur émérite à l’université Paris-Diderot et président de la Société Diderot. Spécialiste des Lumières, de Diderot et du roman classique, il a publié en 2012 chez Hermann un ouvrage en trois volumes, Vies de Diderot, qui est une « biographie littéraire » du Philosophe : les « vies » de Diderot sont celles que ne cesse de susciter, en cette année du tricentenaire de sa naissance, la lecture de l’écrivain des Lumières le plus généreux, le plus gaiement "moderne" et le plus fraternel.

Laurent Loty a enseigné en lettres du collège à l’Université et présidé la Société française pour l’histoire des sciences de l’homme. Chercheur au CNRS, il prône l’indisciplinarité et l’anti-fatalisme. Il enquête sur la genèse de nos croyances et idées, et sur l’humanisme du livre au numérique. Il a codirigé Littérature et engagement pendant la Révolution française (PUR, 2007), Individus et communautés (Dix-Huitième Siècle, 2009), Vers une économie humaine (Hermann, 2014), et coédité avec Éric Vanzieleghem Esprit de Diderot (Hermann, 2013).

Christian Peythieu est comédien, metteur en scène, auteur et pédagogue. Après une formation universitaire et une initiation par le théâtre hispanique de la Sorbonne, il fonde le « Théâtre de l’opossum » et réalise de nombreux spectacles avec la Compagnie. Il enseigne depuis 2008 l’expression théâtrale à l’Université Jules Verne de Picardie.

17h - Projection du film documentaire « Les 3 vies du Chevalier »de Dominique Dattola, au cinéma du Clermontois, salle Paul Lebrun. François-Jean Lefebvre, 19 ans, Chevalier de La Barre, victime de l’Église et du pouvoir royal au XVIIIème siècle.

Ce film vient d’être projeté à Montréal en avant première.

Au sujet du Chevalier de La Barre, Diderot écrit, en 1766, dans une lettre à Falconet :
“ Infâmes bêtes féroces, vous arrachez la langue, vous coupez le poing et la tête, et vous jetez aux flammes un enfant pour une sottise qui mériterait à peine une réprimande paternelle” 

Laurent Loty nous avertit : « on peut trouver beaucoup de citations de Diderot sur Internet, mais une grande partie est erronée, une autre partie non négligeable n’est carrément pas du tout de Diderot… »

et il nous autorise à reproduire quelques unes des citations collectées dans l’ouvrage suivant :

ESPRIT DE DIDEROT, Choix de citations, Laurent Loty et Éric Vanzieleghem, Éditions Hermann, (2013)

JOURNALIER, s. m. (Gram.) Ouvrier qui travaille de ses mains, & qu’on paye au jour la journée. Cette espèce d’hommes forme la plus grande partie d’une nation ; c’est son sort qu’un bon gouvernement doit avoir principalement en vue. Si le journalier est misérable, la nation est misérable.
Encyclopédie, article « Journalier » (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

Pascal a dit : « Si votre religion est fausse, vous ne risquez rien à la croire vraie ; si elle est vraie, vous risquez tout à la croire fausse. » Un imam peut en dire tout autant que Pascal.
Addition aux Pensées philosophiques (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

Celui qui pourrait nous contraindre au bien, pourrait aussi nous contraindre au mal. Un premier despote juste, ferme et éclairé, est un fléau ; un second despote juste, ferme et éclairé, est un fléau plus grand ; un troisième qui ressemblerait aux deux premiers, en faisant oublier aux peuples leur privilège, consommerait leur esclavage.
Essai sur les règnes de Claude et de Néron (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

Comment sommes-nous sortis de la barbarie ? C´est qu’heureusement il s´est trouvé des hommes qui ont plus aimé la vérité qu´ils n´ont redouté la persécution. Certes ces hommes-là n´étaient pas des lâches. Les appellerons-nous des fous ?
Lettre apologétique de l´abbé Raynal à Monsieur Grimm (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

Combien d’hommes sont morts et combien d’autres mourront sans avoir montré ce qu’ils étaient ! Je les comparerais volontiers à de superbes tableaux cachés dans une galerie obscure, où le soleil n’entrera jamais, et où ils sont destinés à périr sans avoir été ni vus, ni admirés. Soyons circonspects dans notre mépris ; il pourrait aisément tomber sur un homme qui vaut mieux que nous.
Réfutation d’Helvétius (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

Appeler ses esclaves des citoyens, c’est fort bien fait ; mais il vaudrait mieux n’avoir point d’esclaves.
Principes de politique des souverains (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

LE MAÃŽTRE. — Jacques, quel diable d’homme es-tu ! Tu crois donc...
JACQUES. — Je ne crois ni ne décrois.

Jacques le Fataliste et son maître (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)
 
L’enfant de la nature abhorre l’esclavage ;
Implacable ennemi de toute autorité,
Il s’indigne du joug ; la contrainte l’outrage ;
Liberté, c’est son vÅ“u ; son cri, c’est Liberté.

Les éleuthéromanes, ou Les furieux de la liberté (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

« Le premier serment que se firent deux êtres de chair, ce fut au pied d’un rocher qui tombait en poussière ; ils attestèrent de leur constance un ciel qui n’est pas un instant le même ; tout passait en eux et autour d’eux, et ils croyaient leurs cÅ“urs affranchis de vicissitudes. Ô enfants ! toujours enfants !... » Je ne sais de qui sont ces réflexions, de Jacques, de son maître ou de moi ; il est certain qu’elles sont de l’un des trois, et qu’elles furent précédées et suivies de beaucoup d’autres […]
Jacques le Fataliste et son maître (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

Le maître tâtonne moins que son élève ; mais il tâtonne aussi.
Pensées détachées sur la peinture, la sculpture, l’architecture et la poésie
 (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

Jamais, depuis que le monde est monde, deux amants n’ont dit identiquement « Je vous aime » ; et dans l’éternité qui lui reste à durer, jamais deux femmes ne répondront identiquement « Vous êtes aimé ».
« Promenade Vernet », Salon de 1767 (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

La langue du cÅ“ur est mille fois plus variée que celle de l’esprit, et il est impossible de donner les règles de sa dialectique. Cela tient du délire, et ce n’est pas le délire. Cela tient du rêve, et ce n’est pas le rêve. Mais comme dans le rêve ou le délire, ce sont les fils du réseau qui commandent à leur origine ; le maître se résout à la condition d’interprète.

Lettre à Madame de Maux (extrait d’Esprit de Diderot, Hermann, 2013)

Lors de la seconde journée de colloque, dimanche 3 novembre nous aurons au programme :

« Actualité et jeunesse de la pensée de Diderot »

10 h : Présentation de l’exposition prêtée par la ville de Senlis

10h30 – conférence de Marie Guermont : « Diderot et les femmes » - Débat.

Musique du XVIIIème

12h30 – Banquet républicain : voir inscription et réservation obligatoire avant le 29 octobre.

14h – « Comment enseigner Diderot ? » :

table ronde entre professeurs et libres penseurs du XXIème siècle, avec Jérôme Legavre, professeur de Lettres à Crépy en Valois, Jean-Pierre Thullier, professeur de Philosophie de Méru, et Dominique Goussot, membre de la Commission Administrative Nationale de la Libre Pensée.

Débat avec l’ensemble des participants.

-* En quoi, Diderot est-il pour les libres penseurs, non un objet de simple commémoration, mais un homme des Lumières qui éclairent toujours leurs pas ? Matérialiste peu amène à l’égard des religions, forçat mal-aimé de l’universalisme, esprit bouillonnant au service de la liberté, il ne peut que leur rappeler sans cesse l’importance du libre examen qui fonde leur engagement de tous les jours.

17h – Conclusion du colloque par Pierre Chartier

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Pierre Roy et Pascal Clesse présentent Diderot lors de l’émission"divers aspects de la pensée contemporaine" du 13 octobre 2013